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Coup de cœur

Shakespeare is dead, get over it !

Paul Pourveur

Le hasard, le destin ou peut-être bien le libre arbitre a fait se rencontrer William et Anna. Les voilà confrontés à la naissance du sentiment et à leur difficulté à lui donner du sens. Quelle est d’ailleurs la vraie version de leur rencontre? Se sont-ils rencontrés à une séance du Mépris de Jean-Luc Godard ou à la projection de Deux trois choses que je sais d’elle ? Comment gérer cet amour né comme un malentendu entre un antimondialiste convaincu et une comédienne passionnée de Shakespeare ? Comment ces deux perceptions de la réalité peuvent-elles se rejoindre? Comment composer avec une tradition, un passé qui a tendance à s’accaparer le présent ? ‘Shakespeare is dead, get over it’ est une réflexion sur la complexité du monde ‘mondialisé’, un monde en réseau où tout est relié à tout ; mais aussi sur notre rapport au passé, un passé qui est constamment actualisé, comme les représentations des pièces de Shakespeare, invariablement revisitées par des metteurs en scène qui prennent l’alibi de ‘l’universalité du propos’ et des thèmes abordés. Les plongées dans le répertoire du passé et son actualisation nient l’évolution de la pensée humaine. Les époques se succèdent sans se ressembler et redéfinissent à chaque fois les grands thèmes. Le passé ne peut servir à élucider le présent et tout n’est que finalement une question de perception de la réalité. La pièce est faite de fragments, de trous et de fissures qui plongent les personnages dans un non-temps, entre passé, présent et futur, entre ici et là-bas, entre Stratford et Bruxelles, ou Berlin, ou Hotton… Les personnages sont fuyants, ils se démultiplient, s’expriment en se regardant s’exprimer dans un jeu constant entre le vrai et le faux, entre le réel et la représentation.