Dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975, Pier Paolo Pasolini, poète, cinéaste, romancier,  dramaturge, polémiste connu dans le monde entier, était retrouvé mort, massacré, sur la plage d'Ostie près de Rome, dans une zone pauvre et désolée. Quarante années ont passé.  Pasolini est toujours vivant. Son oeuvre littéraire ne cesse d'être republiée et traduite, commentée et enseignée. Ses films font l'objets d'innombrables rétrospectives et festivals. Son théâtre est partout joué. Sa pensée et sa personnalité sont analysées dans de multiples colloques et essais. Poètes, philosophes, cinéastes se réfèrent à lui, tantôt pour l'admirer, tantôt pour poursuivre les polémiques qu'il a suscitées.
Bien qu'un assassin (Pino Pelosi, alors âgé de dix-sept ans) ait été désigné et qu'il ait purgé sa peine, relativement clémente, le mystère de ce crime n'a jamais été élucidé, tant les témoignages ont été contradictoires et hâtifs, et les preuves négligées. L'enquête n'est pas close. Sa vigilance prophétique n'a rien perdu de cette « vitalité désespérée » qu'il disait être la sienne dans un célèbre poème.
Le Théâtre du Rond-Point, sur la suggestion du peintre Ernest Pignon-Ernest, rend hommage à cette grande figure qui dénonçait tous les dangers menaçant la liberté, la création, la dignité. Jean-Michel Ribes et René de Ceccatty ont demandé à des comédiens de lire des poèmes, des textes critiques, des extraits de romans qui tous témoignent d'un même combat civil et d'une même ferveur intérieure et qui ne tolèrent ni consensus superficiel ni tiédeur, mais qui toujours expriment la force d'une pensée autonome et d'une vision poétique.
La vie tourmentée de cet artiste, né le 5 mars 1922 et assassiné à l'âge de 53 ans, alors qu'il venait d'achever le montage définitif de Salò, qu'il préparait son film Porno-teo-kolossal et qu'il écrivait le roman Pétrole (publié, inachevé, vingt ans plus tard), sera évoquée par des témoignages de ceux qui l'ont lu, connu, mis en scène ou interprété, par des extraits de films et par des lectures, en français et en italien.
Chaque nouvelle génération redonne vie à l'univers de cet homme irrécupérable, à la fois insolent et doux, intransigeant et généreux, provocant et pédagogue, mystique et politique, à l'indépendance absolue, à la lucidité sans faille, engagé dans son temps et projeté vers l'avenir, qui est  notre présent, mais aussi notre propre avenir.